Afin de répondre présent au rendez-vous fixé avec le Secours catholique, soit 10 heures devant la maison d'arrêt, je quitte mon logement vers huit heures et pédale dans les rues encombrées de la capitale. Je passe par Neuilly, dont l'organisation du trafic est mal adaptée à la circulation des bicyclettes (le boulevard Bineau, en particulier). Le nombre des voitures commence seulement à diminuer à l'approche de la partie nord de Nanterre, où se situe la prison.
Préalablement à la visite en elle-même, nous sommes accueillis par un agent pénitentiaire femme qui nous présente l'organisation de l'administration pénitentiaire, dont le siège est située rue du Renard à Paris. Je suis très frappé par la faiblesse de la représentation des femmes dans la population carcérale (moins de 5 %), par contraste avec la féminisation spectaculaire des personnels pénitentiaires - selon notre hôte, la présence de femmes aurait des vertus apaisantes pour la population en surnombre de l'établissement, jeune et masculine.
Après l'exposé, nous quittons le mess pour pénétrer dans les bâtiments de la prison à proprement parler. Les visages se crispent, l'ambiance s'alourdit, et pour cause. La sensation d'oppression est particulièrement palpable lorsque l'on visite les cellules du quartier des mineurs, ou encore une autre du quartier disciplinaire, incarnations sordides du désespoir. Il est impressionnant de longer les couloirs de cellules alignées (portes pleines) : on entend alors les détenus qui crient plus qu'ils ne parlent, certains hurlent carrément tels des déments, à tel point que parfois on se demande si on n'est pas dans un asile d'aliénés. Tout est fait pour renforcer l'impression d'insupportable enfermement, les filets antihélitreuillage qui recouvrent les terrains de sport, la superposition de plusieurs couches de grilles aux fenêtres, les barbelés tranchants qui surplombent les hauts murs d'enceinte, les miradors, etc.
La cour intérieure de la prison est souillée par les déchets que les détenus jettent continuellement des fenêtres de leurs cellules, et resemble plus à une décharge qu'à une cour où l'on aurait envie de se promener. Alors que nous circulons dans les couloirs, nous sentons toute l'électricité dont l'air de la prison est chargé. Un détenu nous salue à travers les grilles : "Bienvenue à l'animalerie de Nanterre, bienvenue au zoo !" Il a touché du doigt l'exacte impression que l'on a tout au long de la visite, que les détenus se comportent et sont traités davantage comme des animaux déréglés que comme des êtres humains.
Quel soulagement lorsque nous regagnons l'air libre ! Cette visite m'a obligé à puiser dans mes réservers d'énergie et je n'ai qu'une envie alors que je rentre chez moi, me mettre au lit et faire la sieste ! Très intéressante journée, bien qu'assez éprouvante au final...
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