mardi 30 septembre 2014

Saint-Laurent

Film réalisé par Bertrand Bonello, avec Gaspard Ulliel, Jérémie Renier, Louis Garrel, Léa Seydoux, etc. Sortie française le 24 septembre 2014

Evidemment ce film ne sera guère apprécié des adulateurs du dieu de la mode incarné en Yves Saint-Laurent. En effet, il explore la face cachée du créateur, à savoir une certaine faiblesse de caractère et une grande complaisance envers l'alcool, les drogues et un mode de vie déréglé.

Oui, voir Yves Saint-Laurent (littéralement) dans le caniveau, les fesses à l'air après avoir fait la fête avec des compagnons d'une nuit sur des terrains vagues aux abords de la Gare du nord peut sembler choquant lorsqu'on adore les icônes et ne veut qu'on les touche, quitte à faire l'impasse sur une certaine vérité, elle satisfera les adorateurs d'exactitude qui aiment que l'on s'éloigne des clichés afin de parler plus directement de qui était Saint-Laurent, comment trouvait-il son inspiration mais aussi comment vivait-il lorsqu'il ne faisait pas de la mode. Troublant...

De ce film que l'on peut voir comme un documentaire, on en retire une image nuancée de Saint-Laurent, qui n'est pas intéressé par le monde tel qu'il est mais qu'il le voudrait, c'est-à-dire un monde de légèreté où les sorties en boîtes de nuit occupent la majeure partie des loisirs, lorsqu'on ne se retrouve pas au Jardin des Tuileries à l'affût de sexe, complètement déconnecté par rapport au quotidien, uniquement préoccupé de ses fantasmes dans lesquels Saint-Laurent puise une force créatrice qui l'amène à transformer l'image de la femme en faisant évoluer sa garde-robe, en y introduisant des éléments androgynes, comme le smoking notamment. Saint-Laurent ne semble relié au réel que par Pierre Berger dont on suit les longues négociations lorsqu'il s'efforce d'attirer de nouveaux investisseurs dans le capital de la maison de couture qu'il a fondé avec son ami. Berger soutient son ami à bout de bras, il le protège de ses amants destructeurs, il veille à ses intérêts financiers, il l'entoure d'amour et de bienveillance, il lui prête une épaule solide sur laquelle il peut s'appuyer. Saint-Laurent lui ne fait que faire n'importe quoi, notamment à la fin des années 70 où, par exemple, il donne une interview scandaleuse que Berger tentera de censurer autant que possible. Quel gâchis que ce destin !

Il n'empêche que Saint-Laurent livre une vision de l'homosexualité intéressante, le film nous dévoile ce que c'est que d'être gay : il nous dit l'attirance pour les abîmes, pour le monde de la superficialité et des illusions, cette quête éperdue d'amour / luxure, une certaine fragilité aussi, et la façon dont on peut soit se laisser complètement dominer par ses instincts autodestructeurs, ou alors résister et choisir de vivre / vincere à la place...

Une mention spéciale pour l'interprétation, Gaspard Ulliel amaigri campe un Saint-Laurent magnifique et totalement crédible, jusque dans les scènes intimes et tendres avec Jérémie Régnier en Berger amoureux. Quelle excellente idée aussi que d'avoir fait jouer Saint-Laurent vieilli et détruit par les excès par Helmut Berger, qui incarne la déchéance même, notamment lorsqu'il regarde une scène des Damnés de Visconti, film tourné alors que Helmut était au sommet de sa beauté (pas de son art, car il joue bien mieux aujourd'hui, à présent qu'il a vieilli...).

Une autre mention spéciale pour la reconstitution des années 1970, efficace dans sa discrétion. L'époque est ainsi caractérisée par les vêtements et les allures comme de bien entendu, mais aussi par les éléments d'architecture intérieure, comme dans la scène où Saint-Laurent s'enregistre sous un faux nom dans le hall d'un hôtel terriblement seventies...


 







dimanche 21 septembre 2014

Les Murs à Pêches de Montreuil

En ce dimanche, j'ai rendez-vous avec Etienne car nous devons aller à la piscine tôt le matin. Malheureusement, la nuit a été courte car des fêtards ivres se sont battus pendant des heures sous mes fenêtres et ont amputé ma nuit d'autant. Je suis donc obligé d'appeler Etienne pour reculer notre rendez-vous, je ne pourrai pas l'accompagner à la piscine -- raison invoquée, panne de réveil.

J'arrive finalement chez lui aux alentours de dix heures, et nous partons immédiatement en direction de Montreuil, lui en vélib, moi sur mon vélo de ville. Nous prenons le même itinéraire que la fois où nous sommes allés à Joinville-le-Pont, en empruntant le boulevard de Belleville, en longeant le Père-Lachaise, Charonne, Cour  de Vincennes, Saint-Mandé, puis nous bifurquons en direction du nord avant de stationner non loin de la mairie de Montreuil.

Nous nous dirigeons en direction de la manifestation "La voie est libre", qui rassemble des stands associatifs, parmi lesquels je retiendrais les apiculteurs de Fontenay-sous-Bois, qui organisent des stages d'apiculture urbaine tout en vendant leur production et en construisant des sculptures d'abeilles à partir de ruches. Je retiendrais également les associations qui s'efforcent de recycler les matériaux et équipements usagés, dans un souci de développement durable. C'est ainsi que nous avons une conversation avec un homme qui fabrique du mobilier à base de carton, auquel il s'efforce de donner une forme ainsi que des couleurs originales, tout en s'assurant de la solidité de ses réalisations (tabourets, bibliothèques, etc.).

Cependant, le point haut de notre visite montreuilloise se produit alors que nous atteignons le quartier Saint-Antoine, lieu dans lequel se concentraient les Murs à Pêches. Aujourd'hui, des jardins d'agrément associatifs ont remplacé les cultures maraîchères qui ont tenu le haut du pavé depuis Louis XIV jusqu'au 19e siècle. Ils sont ouverts en ce week-end des visites du patrimoine national, et nous en profitons pour nous enfoncer au milieu de plants floraux épanouis, aux couleurs intenses et variées. En outre, nous passons par des terrains laissés en friche, un jardin médiéval, des reconstitutions des murs à pêches à petite échelle tels qu'ils se présentaient encore au siècle dernier, avec des arbres auxquels on s'applique à donner une forme particulière en les liant aux clous qui dépassent des murs. En ce jour ensoleillé, on peut nettement ressentir la différence de température à partir du moment où l'on entre sur le site des anciens murs à pêches.

Il règne sur cette parcelle du territoire montreuillois une quiétude bucolique, alors qu'on se trouve au milieu de la végétation luxuriante qui envahit les murs à pêches à certains endroits, si bien qu'on a du mal à réaliser que l'on se trouve en plein milieu de l'agglomération parisienne.

C'est avec un peu de regret que nous quittons Montreuil, en passant cette fois par la rue des Pyrénées, où il nous faut zig-zaguer entre le voitures bloquées par la brocante installée aux environs de Ménilmontant/Belleville. Après avoir longé le parc des Buttes Chaumont et Laumière, nous regagnons l'appartement d'Etienne par la rue Ordener. Nous nous reposons chez lui quelques minutes, le temps d'écouter quelques disques de sa collection de vinyles, dont la B.O. du film Tenue de soirée chantée par les Rita Mitsouko. Nous sommes décidément de la même génération ! Nous concluons notre journée en nous rendant à notre petit restaurant sri-lankais habituel, avant de nous  séparer, les batteries complètement rechargées et prêts à affronter la semaine qui commence dans quelques heures.





Eglise Saint-Pierre Saint-Paul de Montreuil