jeudi 29 janvier 2015

Vernissage de l'exposition consacrée à Denis Robert, Galerie W, Montmartre

Denis Robert est connu pour son travail de journalisme d'investigation (Libération, Canal +), centré sur le fonctionnement de la chambre de compensation financière Clearstream, dont il ne cesse de dénoncer, entre 1996 et 2008, les manquements dans la lutte contre le blanchiment d'argent, en fondant son analyse sur des listings confidentiels de transactions financières. Ses enquêtes lui vaudront de multiples procédures judiciaires, dont il sort, après de longues années de procès, globalement vainqueur, notamment lorsque la Cour de Cassation atteste en 2011 le sérieux de son travail et la valeur de sa contribution au débat démocratique sur les questions relatives à l'organisation des flux financiers.

L'affaire Clearstream est le départ d'un imbroglio politico-juridico-financier, sur lequel viennent se greffer d'autres affaires, à savoir : (i) la falsification de listings Clearstream pour qu'ils fassent apparaître le nom de certains détenteurs de comptes par lesquels auraient transité des sommes indues, mettant injustement en cause des personalités françaises de premier plan, dont Nicolas Sarkozy ou DSK ; (ii) une compagne de presse orchestrée par Edwy Plenel à l'époque où il était directeur de la rédaction du Monde (1996-2004), qui remet en cause la qualité du travail réalisé par Denis Robert en insistant sur son manque de rigueur supposé, l'accusant peu ou prou de diffamation. Dans le premier cas, il apparaît que Denis Robert a été instrumentalisé dans le cadre de règlements de compte et que ses listings ont été truqués par des individus censés l'aider dans leur décryptage, en ajoutant des noms de personnalités qu'ils ne contenaient pas dans leur version originale. Dans le deuxième cas, des jalousies professionnelles seraient à l'origine du dénigrement systématique dont Denis Robert a fait l'objet de la part de certains organes de presse.

Que faut-il retenir de tout cela ? Denis Robert a effectivement contribué à certaines avancées dans la lutte contre le blanchiment d'argent, ce qui a donné lieu à une campagne internationale en faveur d'une transparence accrue dans les transactions financières (adoption en 2014 de nouvelles mesures par le Parlement européen ; priorité donnée à ce thème lors des réunions des principaux organismes interétatiques, comme l'OCDE ou encore le G20). Il est vrai que le chemin à parcourir est encore long avant d'aboutir à une transparence totale. Mais il existe une prise de conscience, à laquelle le travail d'individus tels que Denis Robert a certainement contribué.

Quel lien avec l'exposition ? Denis Robert expose son travail de peintre, dans lequel il apparaît que l'affaire Clearstream tient une place prépondérante. Il s'attache, parfois de manière outrée ("Shoot the bank"), à une critique acerbe de la finance non plus à travers une enquête journalistique, mais au travers de toiles peintes qui contiennent des slogans dénonciateurs, peints par-dessus des listings de transactions financières, dans un style pop art/street qui n'est pas sans rappeler l'inspiration première des oeuvres de Basquiat. Son but, peut-être, souffler sur les braises, insuffler une atmosphère insurrectionnelle visant à abattre ces organisations géantes qui nous oppressent.

Son exposition est donc conforme à sa démarche militante dénonciatrice, mais on cherche la poésie et la douceur dans ses toiles généralement dures, anguleuses, aux couleurs vives appliquées en larges tâches rouges, jaunes, noires. Les toiles deviennent de véritables déversoirs de la colère de l'artiste.  Dans ces conditions, qui aurait envie d'accrocher les oeuvres de Denis Robert dans son salon ? Par ailleurs, quel est le business model de Robert, lorsque l'on sait que les acheteurs d'art contemporain proviennent principalement des rangs des individus qu'il dénonce à longeur de pages et de toiles ? Il est vrai que personne n'a de goût pour l'oppression, néanmoins, le monde a besoin d'être organisé par des Etats et des multinationales pour produire la richesse, la sécurité et les biens matériels dont nous avons besoin. Et si le caractère illégal de certaines activités doit être inlassablement et implacablement combattu, c'est en travaillant main dans la main avec ces organisations à l'amélioration de leur fonctionnement que l'on doit y arriver. Autrement dit, oui à une démarche pragmatique en vue de la réforme du système en place ; non à la révolution et la politique de la table rase !







Sinon, quoi d'autre à la Galerie W ?



Pierre-Alex, Elephant


Chris Morin-Eitner - Paris Jungle Tour Eiffel

Chris Morin-Eitner - Paris New York Liberty 30mph

Chris Morin-Eitner - Paris Opera Garnier, Ballet

Troy Henriksen - Heart Trust Love, avec en reflet, Self Portait Poet

Un soir de pluie, à Montmartre, vue sur le funiculaire


mercredi 21 janvier 2015

Heinrich Himmler, the decent one

Documentaire de  Vanessa Lapa, composé d'extraits de la correspondance de H. Himmler lus en voice over par des acteurs par dessus des images d'archives 1900-1945.
Sortie française le 14 janvier 2015. 

Ce film documentaire nous conduit crescendo jusqu'au vertige procuré par cette nouvelle incursion dans les horreurs commises par les Nazis et plus particulièrement leur milice, la "SS" ou "Schutzstaffel" ("Escadron de protection"),  dirigée par Himmler.

Nous commençons calmement par la naissance de Himmler en 1900,  prélude d'une enfance  münichoise passée  au sein dune famille aimante,  bourgeoise et stable (son père est professeur dans un lycée, il est conservateur et soutient des thèses nationalistes modérées).  Malgré cela,  Himmler est un enfant souffreteux et émotif. Il semble avoir du mal à gérer la contradiction.  Puis vient la Première guerre mondiale qui se solde par une défaite,  incompréhensible pour les nationalistes allemands qui placent leur patrie au dessus de toutes les autres et souffrent de la voir abaissée par le Traité de Versailles.

Le romantisme du jeune Himmler est encore exacerbé par ce qu'il perçoit comme l'entrée en décadence du peuple allemand lors de la République de Weimar, qui offre un tableau  en contradiction totale avec les récits idéalisés sur les ancêtres germains de la Nation : (i) les femmes perdent la notion de leur place assignée dans la société, allant même jusqu'à refuser de faire de enfants ; (ii) les loisirs et la débauche qui ont fait la réputation de Berlin dans les années 1920 prennent le dessus sur le goût du travail et de la sobriété généralement associé aux qualités germaniques ; et (iii) l'homosexualité s'affiche de plus en plus ouvertement, au grand dam de Himmler qui est alarmé par la chute de la moralité que cette situation révèle. Himmler est convaincu qu'il est impératif pour les Allemands de se ressourcer dans les mythes fondateurs de la civilisation germanique pour retrouver l'esprit des chevaliers teutoniques et ainsi régénérer les qualités profondément allemandes que sont l'ordre, la ténacité, l'endurance et la résilience, autant de manifestations du génie national destiné à dominer le monde. 

C'est à cette époque qu'il forge sa philosophie fondée sur l'exclusion et l'élimination de tous ceux qui feraient obstacle à la restauration des qualités allemandes ancestrales, parmi lesquels les Juifs, peuple internationalisé par excellence, dénué de toute conscience nationale et caractérisé par son amour excessif du lucre. Himmler dénonce également les homosexuels inassimilables à son grand dessein de sursaut national, en tant qu'éléments perturbateurs,  individualistes, indisciplinés et dominés par leurs bas instincts. Himmler en a également après les communistes dont les idées contribuent au ramollissement de la vitalité populaire,  là où lui ne cherche qu'à la galvaniser.

Au début des années 1920, Himmler rencontre Hitler, qui lui confie rapidement le commandement de la SS destinée dans un premier temps à assurer la protection personnelle du Führer, avant de croître pour devenir une structure d'encadrement paramilitaire des rassemblements organisés par le parti, pour enfin s'instituer comme organisation parallèle à la Wehrmacht, armée régulière de l'Etat allemand.

Himmler devient ainsi le grand maître d'oeuvre de la solution finale de la question juive,  en faisant construire et en supervisant personnellement la gestion des camps de concentration tels que Dachau ou Auschwitz. D'une manière générale, il prend en mains la lutte contre les opposants au régime, ainsi que la politique eugéniste visant à éliminer les éléments de la population qui ne correspondent pas à l'idéal aryen.

On l'aura compris, la vie de Himmler est jalonnée d'actes brutaux, barbares, dont il se défend en affirmant qu'il est parfois nécessaire de se montrer dur et implacable lorsque le bien de la population aryenne est en jeu, même s'il s'efforce de rester "convenable" ("decent") en toute circonstance.

Alors que les Nazis mettent en oeuvre leur théorie du "Drang nach Osten" (poussée vers l'est), les idées de Himmler deviennent de plus en plus folles et sectaires, prônant une violence sans répit qui s'abat sur des segments de population toujours plus importants (l'ensemble du peuple polonais, et plus particulièrement sa composante juive). Dans sa correspondance, on peut voir la dérive de Himmler s'accentuer jusqu'à se transformer en délire psychopathe. Sa relation à Hitler finit par prendre le dessus sur toutes ses autres relations, même familiales -- ainsi, il renie son père qu'il trouve trop faible.

A force de cruauté et de massacres perpétrés en masse,  il écope de la réputation de "meurtrier du siècle". Il n'aura d'ailleurs pas le courage de se défendre devant les tribunaux alliés puisqu'il se suicidera peu de temps après sa capture en 1945. Il laisse ainsi son cher pays à l'état d'un champ de ruines, dans un chaos indescriptible, livré en pâture aux Anglo-Saxons et aux Russes abhorrés. Ces derniers,  malgré leur infériorité théorique largement ressassée par les Nazis qui les ravalent au rang de bêtes,  auront fini par écraser l'insurpassable Allemagne ! De ce désastre,  Himmler et ses idées sans queue ni tête,  portent une part de responsabilité écrasante. Il laisse derrière lui une femme, une fille, une maîtresse et deux enfants naturels.

Le film est un montage d'images d'archives de la période nazie, sur lesquelles des acteurs lisent la correspondance échangée par Himmler et ses proches. Le procédé permet de mettre en lumière le glissement de Himmler vers un fanatisme sans frein, notamment lorsque l'on compare les idéaux nationalistes "innocents" qu'il exprime durant sa période estudiantine, avec la dureté dont il ne cesse de se prévaloir comme d'une nécessité absolue pendant qu'il occupe les responsabilités les plus hautes au sein de l'appareil d'Etat nazi.

En fait, ce qui frappe, c'est l'irréalisme de ses propositions en faveur d'une pureté absolue de la race germanique, impliquant l'extirpation de tous les éléments non conformes/déviants du peuple allemand, et partant la mise en oeuvre d'un nettoyage ethnique implacable qui s'étend même au-delà des frontières originales de l'Allemagne, en France, mais aussi et surtout en Pologne et dans le reste de l'Europe orientale.

Ce qui frappe également, c'est l'incapacité de Himmler à considérer toute idée contraire autrement que comme une menace devant être anéantie. C'est ainsi que rapidement, Himmler et l'ensemble des dignitaires nazis perdent tout contact avec la réalité dont ils nient le caractère pluriel, pour s'enfermer dans des schémas qui n'ont plus rien à voir avec les faits de nature ni avec l'économie du monde. A mesure que Himmler s'enferme dans un monde de contre-vérités, tout se passe comme s'il voulait se persuader à tout prix que les murs sont horizontaux, et que la main de l'homme possède quatre doigts. Nous assistons ainsi à un dangeureux affaiblissement de son jugement, aboutissant à la ruine et à la destruction de l'Allemagne, sans compter les souffrances infligées au reste du monde.  




mercredi 14 janvier 2015

Balade en soirée vers l'Assemblée Nationale, Concorde, Grands Boulevards, Gare de l'est, Montmartre, La Chapelle

Je décide d'accompagner Étienne pendant une partie de son trajet pour un peu me dégourdir les jambes et finirai par le raccompagner jusque dans son quartier de Barbès, carrément.  En chemin,  nous tombons, sauf que ce n'est pas un hasard, sur l'épicerie d'Amélie Poulain, la galerie W, des fresques murales plongées dans une semi obscurité, avant d'aller manger à La Chapelle dans le restaurant Sri Lankais qu'il m'a fait découvrir et que j'ai désormais adopté.  C'est la peau du ventre tendue à l'extrême que je rentre finalement chez moi,  après une promenade pleine de découvertes intéressantes.
 

Rue Yvonne le Tac, Paris 18


samedi 10 janvier 2015

Visite du Centre Pompidou, avec les expos de Jeff Koons, Robert Delaunay et la collection permanente


Je suis déçu par la rétrospective Koons, car de nombreuses œuvres font entrer au musée une esthétique façon « nains de jardin », habituellement taxée de mauvais goût, kitsch, etc. Le coup de génie de l'artiste consiste à avoir intégré la culture populaire dans ce qu'elle a de plus quotidien (objets électroménagers, aspirateurs), banal, commercial (publicités – à peine – détournées de grandes marques de luxe ou d'articles de sport), enfantin même (ballons, superhéros), bouleversant ainsi les repères de goût des amateurs d'art contemporain les plus sophistiqués.
L'ironie, le fait de prendre à ce point à rebrousse-poil les repères du "bon goût" a provoqué chez moi une réaction d'incompréhension, voire de rejet. A force de détournement de la culture mainstream, le visiteur finit par se demander si Koons ne se moque pas quelquefois de ses propres amateurs, tout simplement, en les faisant adorer des œuvres très chères, certes, mais dont les qualités artistiques intrinsèques demeurent sujettes à caution. Serais-je allergique à l'art contemporain ? Je ne pense pas, car je ne ressens pas le même scepticisme face aux œuvres de Warhol ou Bastiat, qui provoquent chez moi une réaction d'enthousiasme, au lieu de la froideur et d'une certaine irritation face à Koons.
Par ailleurs, la rétrospective ne donne à voir qu’une toute partie de l'œuvre de Koons, et on peut se poser la question du choix des œuvres qui sont exposées. Une curiosité cependant, la section « Sex » qui donne à voir les ébats (gros plans sur les organes génitaux en action) de l'artiste avec la Cicciolina avec laquelle il a un temps été marié.
La collection permanente du musée présente des œuvres d'un grand intérêt, notamment autour de Robert/Sonia Delaunay (art abstrait des années 1930 ; préparation de l’Exposition internationale de 1937) ; de réalisations architecturales audacieuses (centrales nucléaires (!!)) ; des mobiles d'art cinétique ; une palette d'expériences sonores / lumineuses, etc. Il y aussi quelques toiles remarquables de Matisse, ou encore de Francis Bacon.
Mais il y a tellement de choses qu’à la fin, on finit par avoir la tête qui nous tourne…
 


Art cinétique : les oeuvres contiennent des parties qui sont en mouvement


Restaurant Les 3 Frères, rue Léon, Paris 18, réputé pour ton couscous maison,
et son ambiance "alter"



 

lundi 5 janvier 2015

Pasolini

Biopic réalisée par Abel Ferrara, avec Willem Dafoe, Ninetto Davoli, Riccardo Scamarcio. Sortie française le 31 décembre 2014 (1h.24min). Co-production franco-italiano-belge.

 Difficile de rendre compte de  la vie passionnée de Pasolini, entre ses amours,  ses engagements politiques,  ses flirts insistants avec le monde de la pègre,  son aspect créatif dans plusieurs domaines artistiques,  que ce soient la littérature,  la poésie,  ou le cinéma.
Ferrara choisit de mettre en scène son personnage,  impeccablement incarné ici par Willem Dafoe,  en se concentrant sur les derniers jours de la vie de Pasolini.  Outre les scènes un peu outrées concernant la vie sexuelle débridée du maître,  composée de scènes de drague hardcore de jeunes garçons sur les terrains vagues,  Ferrara rend hommage à la puissance de l'esprit de son personnage en reconstituant quelques tranches de la vie quotidienne de Pasolini.  Nous devenons ainsi les témoins de ses relations avec sa mère,  avec laquelle il habite. Nous l'observons, alors qu'il donne son dernier interview à la presse,  confiant au journaliste les raisons qui le poussent à être si virulent dans ses créations,  ses engagements,  sa vie plus généralement.  Nous le regardons taper à la machine,  le réalisateur en profitant pour nous donner accès à la puissance créatrice de son esprit à mesure que se déploie la non - narration qui caractérise les experiences littéraires des années 1970. Nous le regardons enfin prendre son dernier dîner avec Ninetto,  l'amour de sa vie,  désormais marié et père d'un nourrisson que Pasolini prend tendrement dans ses bras. 
Puis c'est à nouveau la ronde de nuit,  en compagnie dun garçon quil ramasse dans la rue,  et qu' il harponne gaillardement,  sans que sa conquête ne manifeste de plaisir particulier,  c'est tout le contraire,  même.  Puis c'est la révolte du garçon qui,  retrouvant ses copains,  passe le micheton à tabac avant de le laisser pour mort dans ce funeste terrain vague d'Ostuni,  après lui avoir roulé dessus avec sa propre voiture,  instrument de séduction.  Pasolini est malheureusement ainsi rétribué des risques qu'il prenait toutes ses nuits de ronde en quête de luxure. 
Beau film en raison de son côté mistico-pasolinien, de son esthétique et du jeu de ses acteurs,  sobre et raffiné.



 



dimanche 4 janvier 2015

Mimizan - Châtillon via Labouheyre, Dax et Austerlitz : retour au bercail


Petite balade de mi-journée sur la plage de Mimizan

Vue sur l'observatoire de l'étang de la Malloueyre depuis la plateforme de la dune littorale.
Nous avons vu une famille de ragondins nager dans l'étang




Sur la piste cyclable entre Mimizan et Pontex-les-Forges


 



vendredi 2 janvier 2015

Rochefort - Mimizan via Bordeaux-Saint-Jean et Labouheyre




Sur le chemin de la Charente à Rochefort...

 



 

 
 
 

Soleil couchant et brûme montante sur la forêt des Landes